La frontière de la pauvreté
EAN13
9782753526808
Éditeur
Presses universitaires de Rennes
Date de publication
Collection
Géographie sociale
Langue
français
Fiches UNIMARC
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La pauvreté n’a pas disparu avec la richesse dans les pays développés. Réalité
sociale prégnante, elle contrarie l’idéal égalitaire sur lequel est fondée la
démocratie et suscite de très nombreuses études en sciences sociales. En se
saisissant du concept de frontière, ce travail de géographie tente de
déconstruire les propos courants sur la fracture sociale, les poches de
pauvreté, l’exclusion, le mal des banlieues et de dépasser la vision
substantialiste des lieux découlant habituellement de ces propos. L’objectif
est de déchiffrer ce qui se joue entre la position dominée des populations en
situation de pauvreté dans la société et leur position dans l’espace en
examinant les multiples conjonctions qui s’établissent entre leur
disqualification sociale, leur situation résidentielle et leurs pratiques de
l’espace. La définition de la pauvreté donnée par Georg Simmel en 1907
constitue la clé de l’approche sociale de la pauvreté. En exposant que
l’individu pauvre n’est pas exclu mais au contraire lié à la société par la
relation d’assistance, Georg Simmel a montré que la pauvreté touche des
personnes très différentes par leurs appartenances et leurs histoires. Elles
partagent l’expérience commune de la quête incertaine ou impossible du
travail, perçoivent des aides qui les rendent redevables à la société et les
installe dans une situation de dépendance dans la quelle elles sont tenues de
répondre aux injonctions des intermédiaires sociaux. De ce fait, elles passent
une frontière intérieure disqualifiante qui les protège et les enferme tout à
la fois. L’étude de la spatialité de cette frontière repose sur deux
propositions complémentaires. Premièrement, la position sociale disqualifiée
des populations touchées par la pauvreté correspond à une situation
résidentielle défavorable au regard de trois effets de lieu négatifs en termes
d’aménités et de représentations. Deuxièmement, le passage de la frontière
conduit les intéressés à l’expérience d’une territorialité du repli, produite
par un double processus de blocage des migrations résidentielles et de
restriction de la mobilité habituelle. En associant les deux propositions on
peut établir que la trace de la frontière de la pauvreté est polymorphe. Elle
se présente tantôt sous une forme transparente dans les beaux quartiers, les
couronnes périurbaines de la ville et certaines campagnes, tantôt sous une
forme labile au centre de la ville, tantôt sous une forme marquée, voire
redoublée par les effets de la ségrégation antérieure, dans les quartiers de
la politique de la ville ou les territoires de sédentarisation des nomades. La
frontière de la pauvreté se durcit tandis que les inégalités sociales se
renforcent. Dissimulée par de nombreux jeux de masques et d’échelles, elle est
peu visible aux yeux de la société. Il faut donc veiller à ce que la pauvreté
soit comprise dans toutes ses dimensions pour répondre au défi politique et
social majeur que représente l’effacement de cette frontière.
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