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Conseillé par Yv20 janvier 2019
Paris, 1931, quelques jours avant l'ouverture de l'Exposition Coloniale, en grandes pompes, par le Président de la République Gaston Doumergue, tous les crocodiles meurent d'un coup. Une solution rapide est trouvée avec un cirque allemand qui, contre le prêt de ses alligators et autres reptiles demande à recevoir une partie des Kanaks exposés comme des cannibales. C'est ainsi que Gocéné, jeune homme extirpé de sa Calédonie natale est séparé de Minoé, sa jeune promise sur laquelle il avait promis de veiller. Minoé est envoyée en Allemagne. Gocéné s'évade et tente de la retrouver.
A partir d'un fait réel, Didier Daeninckx construit une histoire incroyable et folle dans la capitale de ce début des années trente. Fidèle à ses thèmes de prédilection et à ses indignations, il montre toute l'aberration et l'horreur de l'Exposition Coloniale. Mais quel cerveau malade a un jour eu l'idée d'exposer des hommes et des femmes, les obligeant à singer des pratiques qui ne sont même pas les leurs ? "Je leur explique qu'on nous obligeait, hommes et femmes, à danser nus, la taille et les reins recouverts d'un simple manou. Que nous n'avions pas le droit de parler entre nous, seulement de grogner comme des bêtes, pour provoquer les rires des gens, derrière les grilles... Qu'on nous a séparés ainsi qu'on le fait d'une portée de chiots, sans qu'aucun ne sache où était son frère, sa sœur. Qu'on nous traitait d'anthropophages, de polygames, qu'on insultait les noms légués par nos ancêtres..." (p.47)
Gocéné et son ami Badimoin avec lequel il s'échappe du parc de l'exposition vivent une aventure peu commune, rencontrent des gens qui les ignorent, d'autres qui les méprisent et certains qui les aident. Sans doute assez proche de la réalité de l'époque.
C'est un court roman, qui, comme toujours chez l'auteur se base sur un contexte fort qui ne peut pas laisser indifférent, et sous le prétexte de raconter une intrigue aborde les questions essentielles de la fraternité, de l'humanité, de la haine de l'autre par peur de la différence, du racisme, enfin de toutes ces choses qui ont une malheureuse tendance à revenir à la surface en ce moment et qui ne préparent pas le mieux.